L’histoire de Hella Szymkowicz & Léon Lewkowitz, les arrière-grand-parents de Dominique Delescaille (RTL journaliste).
Elle s’appelait Hella Szymkowicz, lui, Léon Lewkowitz, un jeune couple juif polonais venu en Belgique avec leur fils, Salomon, qui a vu le jour lors de leur traversée de l’Allemagne.
Naîtront deux autres enfants dans leur pays d’accueil, là où ils pensaient trouver le bonheur, Régina, ma grand-mère et David, son petit frère.
Très vite, la famille devra déchanter, elle survivra de petits boulots en petits boulots, déménagera souvent avant de se poser à Charleroi dans le Hainaut, sans papiers, sans réelle possibilité de retourner à Krzepice ou Wielun, leurs villes d’origine.
Tant bien que mal, ils s’intégreront partout où ils passent : Léon travaille dans les charbonnages, dans le commerce de tissus, il sera marchand ambulant ; sa fille, Régina, deviendra même apprentie tailleuse avant de donner naissance, à l’âge de 14 ans, à la petite Louise.
Quelques mois plus tard, le fils aîné, Salomon, décédera à l’hôpital, sa mère est très malade.
Louise, qui porte le nom de Lewkowitz, est confiée à une famille voisine, des Belges du quartier, qui changeront le nom et le prénom du nourrisson, par peur des dénonciations ; les rexistes sont bien présents en ville. Nous sommes fin 1939, la guerre est à la porte de la Belgique.
Le 15 août 1942, le drame s’abat sur eux, tous sont déportés à Auschwitz-Birkenau, David n’a que 11 ans, Régina, 17. Le 8 août, ils se sont présentés à la caserne Dossin, une semaine plus tôt, l’« Antichambre de la Mort ». Ils la quitteront au sein du convoi III avec à son bord quelque 1 000 personnes, dont 342 hommes et 86 garçons, 468 femmes et 86 filles, débarqués en rase campagne sur la Judenrampe.
Après la sélection, 362 déportés seront mis au travail, 5 seulement seront encore en vie à la libération du camp, le 27 janvier 1945. Les 638 restants seront tués dans les chambres à gaz, probablement le jour de leur arrivée, le 17 août 1942, le triste sort de la famille Szymkowicz-Lewkowitz décimée alors qu’elle pensait trouver du travail.
Louise, cachée dans les caves à Charleroi, est donc la seule à avoir échappé à cette tragédie humaine, croyant durant toute son adolescence avoir été abandonnée. À 12 ans, elle découvrira brusquement sa véritable identité et ce n’est qu’à l’âge de 68 ans, qu’elle verra pour la première fois le visage de sa mère biologique grâce aux nombreuses recherches entreprises par sa fille. Un cadeau inestimable pour plusieurs générations.
Notice de Dominique Delescaille
Auteure de « Ma grand-mère, cette jeune Polonaise morte à Auschwitz. À 68 ans, sa fille découvre enfin son visage » aux éditions Jourdan avec une préface du peintre, Charles Szymkowicz.